Publié dans éditions Hugo Thriller, cadavre, corruption, Passion polar français, peur

Passion polar français: La Dame Blanche, Denis Zott.

C’est certain, un vent mauvais, porteur de malheur et de destruction, souffle sur la campagne de Puech Begoù…

L’auteur:

Denis Zott, natif de Strasbourg, spécialiste de la communication des collectivités locales, a longtemps sillonné l’Hexagone avant de poser ses valises à Saint-Tropez, où il exerce la fonction de directeur de la culture au sein de l’administration communale. Il est l’auteur de deux romans, dont Maudite, publié en juin 2018 par Hugo Thriller, qui a remporté un joli succès.

Le roman:

La Dame Blanche a été publié par les éditions Hugo Thriller en 2022. Le style de l’auteur, taillé à la serpe, ne laisse aucun répit…: « Virage serré. Un sentier de terre cahoteux, invisible depuis la route. La forêt absorba le véhicule dans ses entrailles. Dans le coffre, le matériel brinquebalait. » (Page 18)… »Johnny pressa le pas. Hâte d’en sortir. Sa respiration saccadée, le souffle haletant du Chauve dans sa nuque. Un ballet d’odeurs, de fragrances capiteuses et inconnues. Asphyxiant. » (Page 22)…

…et utilise les sonorités des mots pour restituer la tension psychologique qui anime le roman: « La voix stridente de la vieille traverse les cloisons, traverse le crâne de Césaire. Toc, toc. Un son métallique. L’instrument de torture que la vieille tient entre les mains cogne contre la porte. Les coups de tête de l’ours en cage ébranlent le cagibi. Dans le trou à la place du loquet se glissent deux doigts rachitiques. » (Page 12)… »Il arriva dans la cour, essoré de sueur. Le vent s’était levé et lui glaçait les os. Il marcha, voûté, tête baissée. S’arrêta devant le Tube. S’appuya contre la carrosserie. A bout de souffle. Epuisé par trop d’émotions. Il devait se décider, maintenant. » (Page 141).

Construction: le roman se découpe en trois parties; les chapitres courts, dont certains indiquent le lieu et l’heure, s’enchaînent à une cadence qui ne laisse au lecteur aucun répit, emporté dans ce tourbillon d’angoisse qui monte crescendo.

L’intrigue:

Une mission en apparence très simple. Sans difficultés insurmontables. Enlever une jeune femme et la conduire dans un endroit précis: un village du Tarn nommé Puech Begoù. Un trou paumé. Johnny et trois de ses anciens acolytes de prison seront bien rémunérés. De quoi changer de vie. Enfin si tout se déroule bien.

Mais voilà. Rien ne se passe comme prévu. Pourquoi le vigile a débranché l’alarme à leur arrivée avant de se suicider? Pourquoi des photophores balisaient le chemin, comme si tout était prévu pour que tout se déroule selon leur plan? Qui a prévenu la jeune femme qu’ils allaient venir et l’emmener? Et qui est ce Gari dont elle ne cesse de leur rebattre les oreilles? Puis c’est l’accident. Deux morts. Un blessé grave. L’otage en fuite.

Baron n’est plus le même depuis la mort de son fils unique. Il veut vendre toutes ses propriétés et quitter sa terre natale pour prendre sa retraite. Et élever son petit-fils. Son unique héritier.

Mais convaincu que la femme en blanc est responsable de l’accident qui a gravement blessé son petit-fils, il organise une battue. Tous les hommes du canton tremblant à l’évocation du nom de Baron, auquel ils doivent presque tous leur job ou de petits avantages, répondent présent. Impossible qu’elle leur échappe. Traquée par ses hommes, recherchée par la famille Renard, ennemis jurés de Baron, tandis que sa propre famille déploie de gros moyens pour la retrouver, la fugitive trouve refuge auprès de Césaire, « l’esclave » de la mère Renard.

C’est certain, un vent mauvais, porteur de malheur et de destruction, souffle sur la campagne de Puech Begoù…

Les personnages:

Des personnages hauts en couleur, des portraits brossés à l’emporte-pièce, bien dans le ton de ce thriller au rythme effréné:

  • Johnny Grandin: escroc à la petite semaine, rêve du grand coup qui mettra sa famille à l’abri.
  • Charles Baron: ancien commandant au 3e régiment de parachutiste, maire de Puech Begoù, vice-président du conseil général, président de la cave coopérative du canton et de la puissante fédération des chasseurs du Tarn; l’homme fort du coin…
  • Hortense: sœur de Baron.
  • Germaine Renard: chef du clan Renard; n’a pas froid aux yeux et peur de rien.
  • Césaire: domestique et souffre-douleur de la vieille; un peu simplet mais un cœur d’or.
  • Roll Bertrand: capitaine de gendarmerie, neveu de Baron; peine à imposer la loi à son oncle; passe pour un lourdaud incompétent.
  • Terrasson: adjoint de Roll.
  • Brice Renard: fils préféré de la vieille, le plus cruel et sadique; le seul qui a fait l’armée et de la taule; l’honneur de la famille!
  • Martial: second fils de Germaine Renard.
  • Damien: son jumeau.
  • Louise Roger: témoin oculaire de l’accident de Johnny; doyenne de la commune, mère du directeur départemental de la gendarmerie.
  • Philippe de La Salle: frère de la fugitive.
  • Famille Renard: trafiquants, dealers de seconde zone.

Les décors:

Une façon particulière de décrire les paysages, comme s’ils étaient incrustés dans la violence des événements du récit: « Il appréciait ce moment de détente où il pouvait contempler la campagne moutonnante qui évoquait une mer démontée dans les quarantièmes rugissants. Sur chaque crête se dressait une ferme entourée de champs découpés en plaques rectangulaires de différents dégradés de vert, luzerne, herbe à bétail, ou de la couleur or du colza et des tournesols, çà et là piquetés de bosquets ou de petits bois. » (Page 38).

Propriété des Renard, à l’image de la famille, toute en décrépitude et abandon, de quoi décourager tout visiteur intempestif: « Au milieu des bâtisses disposées en U, le corps de ferme. Trois étages de pierres apparentes bouffées de lierre et si trouées par les ravages du temps qu’on aurait pu l’escalader à mains nues. A droite, une grange de bois vermoulu servait de hangar et, à l’étage, de logis pour les domestiques et d’éventuels journaliers. En face, seules concessions à la modernité, les anciennes étables, façade de crépis gris, réaménagées en logement des fils Renard. » (Page 66)…Territoire des Renard, un bon sixième du vaste territoire communal, « une énorme verrue fermée à l’est par ce bois sauvage enchâssé autour de leur ferme et, au nord, par un étang bordé d’un bosquet que les frères avaient bien l’intention un jour ou l’autre de grillager. De préférence avec des barbelés. » (Page 206).

En conclusion:

Du rythme, des rebondissements, une ambiance qui rappelle les péripéties de la famille Duke de la fameuse série « Shérif fais-moi peur » aux prises avec la loi. Un roman plaisant qui se dévore en une nuit d’insomnie.

Citations:

« Césaire ne réagissait plus. Il ne voulait plus rien. Juste qu’on l’oublie, qu’on le laisse tranquille, faire son travail, s’occuper de la cuisine, entretenir les potagers et le jardin, nourrir les animaux et les oiseaux, contempler la campagne, se promener dans les sentiers au milieu des arbres, sentir les changements de saison…Des choses simples pour un homme simple qui jamais ne réclamait rien. » (Page 241).

« Elle éclata d’un rire dément qui dévala tel le tonnerre sur le toit de la ferme. Césaire ne respirait plus. Les mots avaient tabassé ses côtes meurtries, les éclats de rire de la vieille l’avaient criblé comme une volée de plombs à sanglier. » (Page 312).

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