« Il faut du courage pour grandir et devenir qui l’on est vraiment »…Retrouvez lady Swift dans une nouvelle enquête drôle et passionnante…
L’auteur:
Verity Bright est le pseudonyme d’un couple qui écrit à quatre mains depuis une vingtaine d’années. La série Les Aventures de Lady Eleanor Swift, qui compte actuellement dix volumes dont deux traduits en français, a séduit des centaines de lecteurs.
Le roman:
Mortelle Mascarade, Death at the Dance dans la version originale parue en 2020, a été publié par les éditions City en 2022. C’est le second opus de la série Les Aventures de Lady Eleanor Swift. Le style est très agréable à lire, les nombreux dialogues entre Lady Swift et les différents protagonistes faisant progresser l’intrigue de manière cohérente et vivante, parfois drôle: « Donc, vous l’avez suivi à l’étage? -Oui, comme je vous l’ai déjà dit, je l’ai suivi dans l’escalier. -Et qu’a-t-il fait? Franchement, je n’en sais rien. A mon arrivée sur le palier, il avait disparu. Seldon se caressa la mâchoire. -Savait-il que vous le suiviez? -Non, il me devançait largement. » (Page 38)…
L’intrigue:
1920. Début juin. Deux mois après les événements survenus dans Meurtre à l’Anglaise. Invitée au bal masqué organisé par Augusta Fenwick-Langham, Eleanor erre dans le manoir à la recherche de Lancelot qu’elle finit par découvrir dans une situation pour le moins compromettante: un chandelier en argent dans la main droite, penché au-dessus d’un corps sans vie, le coffre-fort grand ouvert…et vide! Comme le coffre n’a pas été forcé et qu’il s’est passé un laps de temps trop court avant l’apparition de l’inspecteur, il en conclut que le voleur connaissait la combinaison.
Autre argument en défaveur de Lancelot: en tombant, la victime a brisé sa montre qui s’est arrêtée à 8h23, exactement deux minutes avant l’arrivée de la police. Personne n’a donc eu le temps matériel de sortir de la pièce. Selon le commissaire Seldon, le colonel, entré dans le bureau pour une raison quelconque, a surpris Lancelot la main dans le sac, en train de voler le collier de sa mère.
Mais Eléanor, bien que figurant parmi les suspects, est bien déterminée, avec l’aide de Clifford, à prouver l’innocence de son ami, et la sienne par la même occasion. Lady Swift se demande si le colonel, homme particulièrement antipathique et doué pour se créer des ennemis, n’aurait pas été tué par vengeance.
Les personnages:
- Eléanor Swift: jeune veuve de 29 ans, aventurière, esprit libre; déterminée, indépendante, un rien têtue, anticonformiste et intrépide, pleine de ressources; riche héritière qui parcourait le monde à la recherche de nouveaux itinéraires pour une agence de voyages.
- Clifford: ancien officier d’ordonnance de l’oncle d’Eléanor qu’il adorait; secret, réservé et guindé. Savoir encyclopédique, logique implacable et sens de l’observation font de lui un excellent enquêteur; bon sens inné; devenu l’ami et le confident d’Eléanor.
- Lancelot Fenwick-Langham: flirt d’Eléanor; accusé de meurtre et de vol; jeune noble aventureux, se joue des conventions, résolument moderne.
- Harold Fenwick-Langham: père de Lancelot; nature excentrique, a son franc parler, homme simple, sans façon.
- Augusta Fenwick-Langham: mère de Lancelot; plus mondaine que son mari; nature généreuse et grand sens pratique. Aime beaucoup Eléanor.
- Sandford: majordome de la famille Langham; ami de Clifford.
- Commissaire divisionnaire Seldon: sous ses dehors bourrus, très bon policier épris de justice; un petit faible pour Eléanor.
- Coco Childs: amie d’enfance de Lancelot; nature spontanée, directe.
- Millicent Childs: soeur de Coco, beaucoup moins sympathique; jalouse d’Eléanor.
- Johnny Seaton: fils de banquier ami de Lancelot; très sûr de lui, nonchalant.
- Albert Appleby: fils de mineur, professeur particulier; ami de Lancelot; vit au-dessus de ses moyens.
- Lucas Serigh: ami de Lancelot; fils du maharajah de la province du Malwar; très riche.
- Colonel Puddifoot: victime, ami du père de Lancelot; vieux militaire exaspérant, doué pour se faire des ennemis.
- Bande de Bright Young Things: nom générique donné à la bande d’ amis de Lancelot: on les dit insolents, frivoles, privilégiés et plutôt stupides. A part Albert, qui n’appartient pas à ce milieu, ce sont tous des enfants de la noblesse ou de la haute bourgeoisie. S’amusent et dépensent sans compter, tentent de tromper leur ennui en multipliant les frasques et en enchaînant les fêtes extravagantes.
En conclusion:
Le +: les dialogues entre Eléanor et Cifford donnent le ton de ce cosy mystery drôle: » Clifford sonna deux fois sur le cordon de sonnette, au niveau de la tête de lit. -Pas d’inquiétude, ces dames auront vite fait de tout débarrasser, vu les circonstances. -Les circonstances? -Il vous reste exactement trente-sept minutes avant que nous partions. -Trente-sept minutes? Bigre, ce n’est pas beaucoup! Parce que nous partons? Mais où? Clifford ajusta les manchettes de ses gants. -Je vous rappelle, madame, que les Fenwick-Langham donnent un bal masqué et que c’est moi qui vous y conduis dans la Rolls. » (Page 6)… »Une fois la chambre remise en ordre, Mrs Butters esquissa une révérence. -Y aura-t-il autre chose, madame? Polly doit-elle vous aider à vous habiller? -Surtout pas! Enfin, non merci, veux-je dire. Je ne sais pas encore avec quel cilice de brocart je vais me mortifier les chairs toute la soirée. La gouvernante gloussa et, d’un regard appuyé, ordonna à Polly de sortir de la chambre. Clifford toussota poliment. -Peut-être serait-il avisé de se « magner la fraise », madame. C’est comme cela qu’on dit, je crois? -Tss-tss! La fraise ne se porte plus depuis longtemps, voyons. » (Page 8)
Dans ce second opus aussi plaisant et drôle que le premier, nous retrouvons avec un égal bonheur une Eléanor toujours aussi fantasque et anticonformiste confrontée à un cas épineux: prouver l’innocence de Lancelot et la sienne dans une affaire de vol de bijoux et de meurtre. Avec l’aide de l’indispensable Clifford toujours toujours prêt à voler au secours de sa protégée et lui rappeler le cas échéant ses devoirs de Lady.
On se retrouve au prochain rendez-vous??
Citations:
» -Une femme? Vous n’imaginez tout de même pas que nous avons affaire à une meurtrière? Quelle femme serait assez cruelle pour commettre un tel acte, au mépris de sa sensibilité naturelle? Eléanor fronça les sourcils. -Et bien, nous sommes définitivement entrés dans le XXe siècle, l’ère victorienne est révolue. Si l’on veut que les femmes aient les mêmes droits que les hommes, il faut y inclure le droit à être soupçonne de meurtre. Même si, je le reconnais, ce point ne figure sans doute pas dans les revendications des suffragettes. -Vous devez certainement me prendre pour un fossile de la pire espèce, mais je n’approuve vraiment pas toutes ces histoires d’égalité. Une femme se présenter au Parlement? Absurde! Mais qu’ont-elles dans la tête? » (Page 83).
« -Voilà des siècles, poursuivit lady Langham, que l’épouse ou la maîtresse incarnent la voix de la raison. En coulisse, les femmes protègent les hommes de leurs pires folies et épargnent au reste du monde les conséquences catastrophiques de ces folies. -Vous croyez que de telles folies ne sont commises que parce qu’on a ignoré la parole de la dame? -Exactement!.(…)Tous ces discours sur l’égalité partent d’une intention louable, mais où ira-t-on si toutes les femmes s’opposent et se calomnient sur la place publique, fréquentent maisons closes et tripots comme les hommes? » (Page 84).
« -Lady Swift, si vous croyez, à tort, pouvoir influer sur l’issue de cette affaire, vous vous trompez. Croyez-vous que je n’ai jamais enquêté sur ces jeunes oisifs qui s’imaginent que leur fortune les place au-dessus des lois? Que leur rang social va les protéger? Les temps ont changé, madame, et ce pays en a par-dessus la tête de vos fichus Bright Young Things, des bons à rien privilégiés qui pensent pouvoir enfreindre toutes les règles de la société et même ôter la vie impunément pendant que les gens ordinaires peinent à joindre les deux bouts et à élever leurs enfants correctement, dans le respect des valeurs de l’Angleterre. » (Page 200).